31 octobre 2011

Swing à Limoges

Quand je suis né, le Hot Club de Limoges va sur ses deux ans ! Rex Stewart (ex-trompettiste de Duke Ellington) a l’honneur de débuter ce qui aujourd’hui est une liste de près de 400 concerts. C’est le 14 janvier 1948 et c’est à la salle Berlioz, un peu le Carnegie Hall limougeaud. « Jazz à Limoges », la saga du Hot Club et de Swing FM de Claude-Alain Christophe, paru aux éditions L’Harmattan ces jours-ci retrace aussi la vie de Jean-Marie Masse, premier et actuel président de cette « institution ».

Quand je suis étudiant, j’écoute ses émissions sur Radio Limoges et tombe dans le chaudron même si j’ai déjà deux disques de Ray Charles et Louis Armstrong ! C’est avec le duo Milt Buckner à l’orgue, Jo Jones à la batterie, enregistré le 10 juin 1969 au Lido à Limoges que je franchis le pas. Le lendemain de la diffusion, je suis à la première heure chez Arpèges LE magasin de disques et j’achète les yeux fermés un 33T de Buckner, tellement fermés que je ne me rends pas compte qu’il est au piano et non au B3 Hammond. Depuis, j’ai assisté à une trentaine de concerts du Hot Club de 1973 à 1996 : Milt Buckner, Jo Jones bien sûr, revenus en 73, Earl Hines, « Wild » Bill Davis, Harry « Sweet » Edison, Jay McShann, Lionel Hampton, Bill Coleman, Sammy Price, Arnett Cobb, Bill Doggett … la fine fleur du swing, mais auusi du blues avec Buddy Guy, Junior Wells ou des negro spirituals et gospel songs avec The Sensational Nightingales, que de sensationnelles nuits de jazz.

Quand je deviens « auteur », je ne manque pas de rendre hommage à Jean-Marie Masse dans « Jazz à Souillac » en 1995 et de le remercier à nouveau en 2008 dans « Histoires d’éloges ». Bien sûr ma route a déswingué aux premiers virages parkérien ou coltranien mais sans rien jamais renier. Jazz pas swing, Swing pas jazz ? En tout cas, j’ai pris un immense plaisir à dévorer cette histoire narrée par Claude-Alain Christophe et illustrée par de nombreuses photos, me rappelant les beaux moments comme celui de la trompette aiguë de Johnny Letman faisant réagir ma fille dans le ventre de sa mère ou les interviews de Johnny Simmen ou le repas avec Illinois Jacquet ! Magnifique travail que je salue en connaissance de cause. Quant à l’aventure de Swing FM, le côté matériel nuit un peu à l’émotion dégagée par ailleurs par la saga du Hot Club et de ses acteurs ralliés au panache blanc présidentiel, mais chapeau à cette initiative d’une des rares radios diffusant du jazz pardon de la swing music 365 jours sur 365, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24.

Le 15 décembre dernier, j’ai passé un grand moment avec Jean-Marie, cet homme de passions, accompagné de Céleste Day Moore, étudiante de Chicago préparant une thèse sur le jazz en France après la seconde guerre mondiale (cf blog décembre 2010). Il avait parlé de ce livre qu’il venait avec l’auteur de corriger, on sentait briller l’impatience dans ses yeux ! En 2012, nous célèbrerons à Souillac, le centenaire de Sim Copans, homme de jazz, de radio (Paris-Inter, France Inter, France Musique…). Nul doute qu’il sera aussi question de Jean-Marie Masse qui lui, avait débuté à Radio Limoges quelques temps après Sim en juin 48… ou 47, dit-il parfois, quand on aime, on ne compte pas !

Robert Peyrillou

Prochains rendez-vous tous les jours sur http://www.swingfm.asso.fr et le 10 décembre à 20h30 au centre culturel Jean Gagnant à Limoges pour The Brown Sisters, les cinq filles du pasteur Brown, rien à voir avec les quatre filles du docteur March qui ne chantaient pas si bien !

« Jazz à Limoges » de Claude-Alain Christophe aux éditions L’Harmattan 220 pages 22 euros





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24 octobre 2011

Le cas Petrella

J'avais entendu le plus grand bien de Gianluca Petrella et qu'il n'ait pu venir jouer à Souillac, en juillet 2010, dans le quintet d'Enrico Rava avait été, pour nombre d'entre nous, un grand regret.
Ceux qui ne l'avaient jamais vu auparavant (c'était mon cas) restaient en outre devant un grand vide. Car, s'il y a génie et génie, le cas Petrella est un mystère. Comment un tromboniste peut-il être, sinon aux yeux d'un autre tromboniste, exceptionnel? L'instrument est, en effet, peu propice aux chorus démonstratifs et on ne trouve pas, dans l'histoire de la musique, de trombonist heroes.
D'ailleurs Petrella n'est pas un instrumentiste démonstratif. En revanche, je ne crois pas avoir, auparavant, rencontré un musicien pour lequel il y avait un lien aussi direct entre son instrument et son imagination. Ce n'est pas en tant qu'instrumentiste que Petrella est exceptionnel, c'est en tant que musicien, compositeur, arrangeur de notes et de sons. Si ce n'était réducteur, je pourrais dire que la musique de Gianluca Petrella est un juste milieu entre le psychédélisme de Pink Floyd (avant la moitié des années 1970), les espaces plaintifs de Ry Cooder, Ennio Morricone, ou encore de Limousine. Ajoutez-y l'intelligence de Frank Zappa et vous pourrez vous targuer d'approcher la bête.
En revanche, l'émerveillement ne doit pas rendre aveugle et il faut avouer que nombre de spectateurs ont quitté l'Automne Club, certains mêmes en plein morceau et j'ai pu entendre un de mes voisins lâcher un "c'est stressant". On est en effet subjugué ou on ne supporte pas. La musique est sans concession au bon, ou au mauvais, goût: pas d'humour, pas de thème, pas de chorus, pas de repère, juste un parti pris onirique, quelque part du côté sombre de la musique. D'où le "c'est stressant". Slaves, son dernier opus, celui-là même qu'il présentait à Toulouse, est à l'image de ce concert. Le visuel d'abord: des chaines, très majoritairement aux couleurs d'acier, en suspension dans un univers noir. Des sons, ensuite, qui grincent, percutent, s'allongent, heurtent, pris dans des réverbérations et des larsens. La prestation de Gianluca Petrella, lors de Jazz sur son 31, venait clore la semaine autour du trombone. Heureusement car, s'il y a un avant Petrella, il n'y aura peut-être pas d'après.
Gilles

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Glenn coulisse

Quand Jazz sur son 31 a annoncé une semaine autour du trombone, j'étais sûr que Glenn Ferris serait à l'affiche. Comment en effet faire l'impasse sur ce grand monsieur de la coulisse? On a donc pu le voir promener ses lunettes noires, son bouc et son trombone sur la scène de l'Autumn Club dans la cour du CG31. Il y était au sein de son Pentessence et en très bonne compagnie: Jean-Michel Cabrol au sax, Philippe Milanta au piano acoustique et à l'orgue Hammond, Bruno Rousselet à la contrebasse et Jeff Boudreaux à la batterie.
Avec son accent d'Américain à Paris, il annonça la couleur: "on va jouer beaucoup de mes compositions ce soir". C'était donc du pur jus Glenn Ferris qu'on allait avoir et c'est tant mieux. Le quintet a commencé avec "Boy Boy" aux allures presque funky. Ce rythme tonique collait pile poil à l'agitation du tromboniste: la musique est une pulsion jusque dans ses mouvements. Même lorsque le quintet enchaîna "Saint James Infirmary", traditionnel au pas funèbre, puisque Glenn Ferris en fait une transe pour nous emmener dans un cortège au sons plaintifs. Cette transe, on y fut également plongé avec "Sabbath Prayer", morceau très enjoué, porté par la pulsion obsédante des souffleurs ou encore "You're so Beautiful". Entre-temps, le quintet nous délivra "Flying" et des sons qui renvoient à l'Azur quintet d'Henri Texier. Le morceau n'apparaît pas sur cet album (j'en aurais pourtant mis ma tête à couper) mais on en retrouve des éléments. C'est carrément superbe et la salle, archi comble et ultra comblée, salua, par une salve d'applaudissements, ce morceau et les autres. Merci, Monsieur Glenn Ferris.
Gilles

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21 octobre 2011

Kurt Rosenwinkel "Time Machine"

« Time Machine » crée un temps à son image, en périodes longues de musique mélodique parfois obsédante et en périodes accélérées d’explosions sonores. Le premier morceau, du batteur Jim Black, dure cinquante minutes pendant lesquelles alternent les temps étirés et les temps énervés. L’espace est alors un univers de ruptures, de contrastes dont l’architecture a le temps de se constituer dans nos imaginaires. Le pianiste guitariste démarre le concert au piano par une ballade tranquille qui contient les motifs répétitifs obsédants constitutifs de la spirale dans laquelle nous engage le quartet. La machine temps étend la durée, répète les sons, embarque dans de longues boucles ; le son mélancolique de la clarinette s’étire sur la chanson du piano aux boucles obsédantes. On plane pendant plus d’un quart d’heure. Un grondement de la clarinette lance une séries d’improvisations où les instruments crient, raclent, frottent, gémissent. La rythmique reste fidèle et émergent des bribes mélodiques, aussitôt explorées. Le clarinettiste saxophoniste Andrew d’Angelo est extrêmement présent avec ses sombres phrases mélodiques, boucles répétitives, envolées dissonantes. On a assisté à un solo de batterie qui restera dans les mémoires : sur un parti pris de faible volume, Nasheets Waits a frappé, frotté, tapé en douceur ; on a tendu l’oreille, savourant chaque sonorité, atténuée, parfois chuchotée. Les instruments en ont profité pour changer : le clarinettiste a sorti son saxophone et le pianiste sa guitare qui groove à fond, pendant un très long chorus. On entend le son particulier de Kurt Rosenwinkel à la guitare, électrique et rond, rapide et fluide. Le chorus de saxophone explore l’univers construit par le guitariste, pousse les sons, hurle, gémit et groove tour à tour comme ceux de la contrebasse et de la batterie qui achèvent l’architecture d’un temps et d’un espace construits en stabilité rythmique et en ruptures mélodiques, comme une tour de Babel dans un espace pas encore délimité. Le premier morceau s’achève alors avec un magnifique solo de guitare où l’écho évoque les profondeurs et étire encore plus le temps alors que la clarinette basse s’échappe dans les recherches sonores les plus audacieuses. Suivront un morceau de Kurt Rosenwinkel et un arrangement d’un thème de Bud Powell, construits avec la même architecture circulaire ascendante, dans un temps qui s’est accéléré, libérant l’énergie. Pour le rappel, réclamé avec force et énergie, le quartet, apaisé, cisèle une ballade, où le piano, sur des motifs longuement répétitifs donne au saxophoniste un espace développé en une mélodie envoûtante. On les quitte sous le charme.

Marie-Françoise

"Time Machine": Kurt Rosenwinkel, guitare & piano; Andrew d'Angelo, clarinette basse & saxophone alto; Eric Revis, contrebasse; Nasheet Waits, batterie

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20 octobre 2011

Kurt Rosenwinkel


En attendant le texte sur le concert que Kurt Rosenwinkel a donné à Toulouse mardi soir en quartet, voici une vidéo du même en solo.

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16 octobre 2011

Réunion


Le fil musical que tricote Manuel Rocheman pour unir les pièces de la soirée de vendredi à l’Automne Club à Toulouse s’appelle Bill Evans, présent par ses compositions, par la réminiscence de ses sonorités ou par son lyrisme plein d’émotion. Avant l’arrivée de l’harmoniciste Olivier KerOurio, et avec beaucoup de délicatesse, le trio Rocheman – Chazarenc – Allamane a joué deux morceaux de Bill Evans et un de Michel Petrucciani. La couleur romantique de la musique de Bill Evans est conservée par Manuel Rocheman qui garde en filigrane les émotions et apporte sa propre poésie, son goût pour les musiques sud-américaines, sa tendresse aussi. La contrebasse et la batterie entrent dans la danse, assurent les tendances voyageuses, bordent les longues phrases du pianiste. Habillé tout en noir, une petite boîte dans les mains, Olivier KerOurio entre en scène, bloque le micro sur l’harmonica, échange des regards complices avec le trio et quelques mots avec le public et se lance dans Le Grisbi de JeanWiener. Cette musique de film dont chacun connaît la mélodie devient légère, pleine d’humour, étirée ou accélérée à l’harmonica, frappée sur les touches du piano qui relaie avec vivacité le chant de l’harmonica. Les deux comparses explorent cet air archi connu, le colorent de leur savoir, de leur jazz et de leur complicité. Ainsi va le concert, où sont réunis Bill Evans et Toots Thielemans, figures majeures du piano et de l’harmonica, où les quatre musiciens s’en donnent à cœur joie pour explorer tous les possibles et même les impossibles d’airs connus. Les audaces tiennent la salle en haleine. On est frappé par l’admiration réciproque des deux musiciens Tous les morceaux éveillent une musique qui dort en nous, tous les airs sont explorés jusqu’à l’extrême, les solos sont chaleureux, chantants, dansants. Olivier Ker Ourio dialogue avec la rythmique, qui, avec aplomb, embarque vers les îles. Un morceau commence par un échange de bruitages, dans l’extrême aigu au piano, un jeu nouveau. Petit à petit se dessine Caravan de Duke Ellington, toujours dans le jeu, la surprise et l’audace, dans le balancement des rythmes des îles, libre fantaisie. Pour finir Olivier Ker Ourio aborde l’hymne national réunionnais, poétique et dansant le trio n’est pas en reste, en accord pour cet autre évocation d’un ailleurs dansant et chantant. Une force porte l’ensemble: le son de chaque instrument est travaillé dans ses moindres détails, au-delà des mélodies. Nos musiques intérieures, parfois oubliées, vivent un instant poétique, vibrent par la rencontre entre l’harmonica, petit objet à peine visible sur scène et l’imposant piano et prennent un envol vers des possibles qu’elles n’avaient jamais connus.
Marie-Françoise

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13 octobre 2011

Sa majesté le Jazz chez la Marquise




Duo découvert l'an passé dans du "Bleu en hiver" à Tulle, cette année c'est en automne à Pompadour que ces deux musiciens vont nous balader du côté de Chet Baker, musicien mythique disparu il y a bientôt un quart de siècle.
"Au piano Christophe Joneau, doigts volubiles et nostalgie secrète, et Jean-Luc Cappozzo, trompettiste volcanique capable
de délicatesses extrêmes, plongeront dans ce répertoire, faisant surgir au cours de leurs impros des fantômes".
Telle était la présentation de ce concert dans la plaquette du festival tulliste. Fantômes ou pas, je vous engage à le constater de vous-mêmes Samedi 15 octobre 2012 salle polyvalente de Pompadour en Corrèze à 21h et à lire l'autobiographie de Chet Baker par lui-même: "Comme si j'avais des ailes" parue chez 10/18.
Pour vos réservations : mairie de Pompadour au 05.55.73.30.43

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10 octobre 2011

A Souillac, le jazz c'est en juillet mais c'est aussi rue de Juillet en octobre !

Soirée JAZZ CLUB au PITCHOU-RIU

10 Rue de Juillet

A Souillac

Avec Bibi Louison au piano

Rendez-vous Vendredi 14 Octobre 2011 à partir de 20h.
Entrée Libre ... et bœuf à volonté si musiciens !

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