25 avril 2010

Médo jouait Miles à Millau

JustifierLe Jus de Bocse proposait hier soir, dans le cadre de Millau en Jazz, un des premiers concerts qui suit la sortie de l'album Shangri-Tunkashi-La. Le projet est loin d'être anodin puisque Collignon propose de revisiter la musique de Miles Davis entre 1968 et 1975. Le risque était de toucher à une icône qu'on ne cite plus que par son prénom, dont on commémore les anniversaires de sorties d'album et un des musiciens de jazz dont la notoriété a dépassé très largement les frontières du genre. On a d'ailleurs parlé à son propos de rencontres avec Jimi Hendrix (ratée car le guitariste serait décédé trop tôt?) ou encore avec Prince (existerait-il des enregistrements?). Bref, le Jus de Bocse propose, dans ce projet, rien de moins que de s'attaquer à Miles.
Et c'est avec beaucoup de respect qu'il a œuvré. On pouvait entendre dans cette explosion de notes, une lecture très personnelle de Miles. On entendait que Collignon a usé ses CD à force de les écouter et les ré-écouter. Il filait, entre sa trompette, le scat, les effets, le jeu de scène, les enchaînements de morceaux, à travers ce qui aurait pu être un piège et qu'il a transformé en réussite. Pourtant, alors que les musiciens entraient en scène, un transfo est tombé en rade et laissa Frédéric Chifoleau sans effets. Il fit tout le concert en acoustique. Plus tard, ce fut Philippe Glaize qui se bagarra avec une batterie qui s'est avéré défectueuse et que, de colère, il finit par mâter d'un bon coup de latte dans la grosse caisse. Mais rien ne pouvait hier soir perturber le Jus de Bocse qui avait engagé le concert par un morceau qui occupa les quarante premières minutes. Et ce sont des tonnerre d'applaudissements qui ont conclut les quelques moments de répit que nous a donnés le quartet. On s'est marré à entendre Médo faire la réclame des quatre pauvres vinyles qui attendait d'éventuels acheteurs à la sortie (putain de raté!), présenter et re-présenter ses musiciens tandis que la bassiste bataillait avec son pré-ampli ou encore lorsqu'il a joué son solo de flûtiau. Mais, l'important n'était pas là et nous ne nous y sommes pas trompés: Collignon était concentré, sérieux, comme sa musique. Tout comme Franck Woeste, Fred Chifoleau et Philippe Glaize. Et quand ce dernier filait ce coup de pied dans la batterie ça ne faisait pas partie du spectacle. Il enrageait. C'était la même énergie qu'ils nous ont donnée à entendre. Que ce soit au service des moments les plus explosifs ou, par exemple, de "Mademoiselle Mabry".
Gilles

23 avril 2010

Résolument Collignon

A propos de Shangri-Tunkashi-la, on parlerait volontiers du dernier opus de Médéric Collignon si ce n'est que la sortie de l'album vient quasi en même temps que la diffusion sur ARTE live web de sa géniale résolution. Ce projet, autour de la musique de Morricone, est plus ancien mais, mis-à-part un film de Josselin Carré très peu diffusé, et quelques images promotionnelles sur le site du cinéaste (reprises sur Youtube), rien, ou presque, n'existait. Bref, la diffusion sur ARTE live web du concert donné par le Septik de Collignon à Grenoble est en soi un événement musical.
Cette concomitance est d'ailleurs à l'image du musicien. Car Collignon laisse une impression de génial frapadingue, planté là où on ne l'attend pas. Et pour cause: ce poly-instrumentiste nerveux, tendance showman éclatant, ne fait rien comme les autres. Collignon, tout le monde en parle, tout le monde adore avec... deux albums, seulement ai-je envie de dire, à son actif. Dont celui-ci que je viens d'acquérir, chez Harmonia Mundi, et que je déballe précautionneusement. C'est, avec sa gueule de vinyl, son graphiqme onirique, sa typo psychédélique, une sorte d'objet néo-vintage. Un coup d'œil aux neufs plages m'indique qu'elles sont des compositions de Miles Davis (pour six d'entre elles), de Joe Zawinul, d'Hermeto Pascoal et de Robert Plant. Bienvenue donc de plain-pied dans l'univers des seventies. Je dois dire que je m'y attendais un peu car j'avais eu pas mal d'échos de cet album qui, unanimement, disaient que Collignon nous présentait son interprétation du brouet de sorcières. Mmh, je m'en délectais déjà. Et voilà que l'album est là, entre mes mains, que j'ai déchiré l'emballage et qu'il ne manque plus qu'un lecteur de CD. Ou alors le concert de samedi qu'il donne à Millau.
Gilles

12 avril 2010

Enrico Rava meilleur musicien de jazz européen à Souillac le 24 juillet

Chancellerie fédérale, Service de presse fédéral. A-1014 Vienne (Autriche)

Prix Hans Koller : European Jazz Prize au trompettiste triestin Enrico Rava Dans le cadre du Prix Hans Koller, le European Jazz Prize 2009 a été décerné le 26 mars au Porgy & Bess à Vienne au trompettiste et compositeur italien Enrico Rava. Né en 1943 à Trieste, il s’engagea à 18 ans dans la carrière de musicien professionnel et acquit rapidement une réputation au sein de l’avant-garde new-yorkaise des années 60. C’est ainsi qu’il joua notamment avec Steve Lacy, Bill Dixon, fit partie du groupe de Roswell Rudd et du Jazz Composer’s Orchestra, dont est issu « Escalator over the Hill » de Carla Bley et Paul Haines. Il fut introduit dans ce cercle par le saxophoniste ténor argentin Gato Barbieri, que la musique du film « Le dernier tango à Paris » de Bernardo Bertolucci (1972) allait rendre célèbre. Le jeu de trompette d’Enrico Rava fut dès ses débuts, malgré les explosions de free jazz, lyrique et mélodieux. Il réussit à fusionner des influences italiennes, nord- et sud-américaines. Pour lui, l’opéra italien est la vraie musique populaire de son pays. Dans des projets de disques tels que « L’Opera Va » et « Carmen », il se consacra à la transposition d’airs d’opéra en jazz. Bix Beiderbecke, Miles Davis et Chet Baker comptent parmi les trompettistes qu’il vénère. Il leur a consacré des disques enregistrés p. ex. avec son collègue trompettiste sarde Paolo Fresu. Mais ses modèles vont aussi jusqu’à des musiciens de New Orleans tels que Nick LaRocca, leader de la Dixieland Band originale, dont les parents sont originaires de Sicile. Il estime également Louis Armstrong. Il entrevoit aussi des affinités personnelles avec le style lyrique d’Art Farmer. Il remplaça le bugliste atteint d’une maladie mortelle dans le projet de duo initié par Franz Koglmann et le label between the lines – avec le pianiste Ran Blake – « Duo En Noir » (1999). Enrico Rava a déjà été distingué à plusieurs reprises pour sa contribution européenne au jazz contemporain, p. ex. par l’ordre français de « Chevalier des Arts et des Lettres ». Il observa pourtant récemment dans un entretien pour le quotidien « Standard » avec Andreas Felber : « Toute cette discussion sur le jazz européen et américain n’est pas nécessairement à mon goût ». Le 27 mars, Enrico Rava donna au Porgy un concert vivement acclamé – avec d’autres lauréats du Prix Hans Koller tels que le percussionniste Wolfgang Reisinger (Musicien de l’année), le saxophoniste Clemens Salesny (Nouveau-venu de l’année) et Max Nagl, dont le CD « C.O.D.E. » - the Music of Ornette Coleman et Eric Dolphy – a été distingué comme CD de l’année 2009.
www.hanskollerpreis.at, www.porgy.at


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09 avril 2010

et Bollani émerveilla

Pas mal de comptes rendus en retard dont un sur le concert que Stefano Bollani a donné, il y a un mois environ, à Bruxelles. On y allait avec, notamment, en point de mire, le fait qu'il se produira cet été à Souillac dans la même configuration (piano solo). Que, parmi celles et ceux qui n'avaient pas réservé, certains s'en soient mordu les doigts (et combien je les comprends) n'est pas, quelque part, pour nous déplaire: Bollani fait venir du monde. Et c'est tant mieux car sa prestation fut fulgurante. Derrière ses cheveux hirsutes, sa barbe garnie et son allure déglinguée, Bollani nous donna à entendre un festival pianistique de haute volée.
Autour d'un concert résolument narratif (on se serait cru quelquefois au cinéma), Bollani déployait des séquences lyriques, sombres, marrantes, émouvantes... tout ça dans un mélange des genres où sa touche de pianiste de formation classique perçait volontiers. On applaudissait à tout rompre dans ce festival flamand et ce jusqu'au rappel où Bollani, carnet et crayon à la main, nous invita à lui dire ce qu'on souhaitait le voir et l'entendre jouer. Entre "So What", Mendelssohn, Paolo Conté e tutti quanti, il y allait, réinterprétant ces classiques de la musique et construisant les articulations. Et tout ça avec une grosse dose de rigolade. Fichtre alors! Qu'est-ce qu'il est imaginatif!
Gilles