22 octobre 2009

Bill Frisell plays Richter 858

C'est un sacré musicien qui se produisait mardi dernier à Ramonville, une sorte d'extra-terrestre dont on ne sait dans quelle mesure il relève du jazz (son étiquette la plus répandue), du folklore imaginaire, de Zappa, Cage ou, plus sûrement, d'art contemporain. Tout, en effet, dans la posture scénique de Bill Frisell, dans son parcours musical et, à cette occasion, le projet qu'il présentait, absolument tout y contribue.
On devine une approche picturale de la musique et, dans le centre culturel de Ramonville-Saint-Agne (au demeurant fort approprié), il n'était pas absurde de se demander si les pupitres portaient des partitions ou des toiles. Celles de Richter en l'occurence puisqu'il était au centre du projet. Et l'idée de composer à partir de ce photographe devenu peintre pouvait nous faire appréhender un niveau d'abstraction peu abordable. Attention, dissonances possibles...
Mais l'univers du quartet de Bill Frisell, c'est d'abord celui de l'intelligence et c'est un questionnement sur l'articulation abstraction/musique narrative nourri d'un imaginaire débordant. C'est aussi un rythme ralenti qui permet la déclinaison de milliards de motifs. Bref, on est beaucoup dans la musique répétitive où tout se joue dans les touchers et les nuances, dans ces infimes décalages qui créent cette sensation de transe. Ces motifs, déclinés à l'infini, sur un rythme obsédant, étaient-ce ceux de Richter à l'oeuvre sur sa toile? Non, réellement, la peinture n'était pas loin et ce concert fut un des plus merveilleux qui m'ait été donnés à voir.
A la fin, après les salutations d'usage, il y eut, pour notre plus grand bonheur, deux rappels à l'issue desquels cet extraordinaire monsieur quitta les bras de sa Telecaster et nous laissa, pour encore de longues heures, avec de fabuleuses images.
Gilles