17 octobre 2007

Bill Evans’ bluegrass

Mardi 16 octobre 2007, Automne club, Jazz sur son 31, Toulouse

Saxophones, clavier, chant : Bill Evans ; violon : Christian Howes ; banjo : Ryan Cavanaugh ; basse électrique : Ric Fierabracci ; batterie : Joel Rosenblatt

Le groupe s’installe et en quelques secondes on bascule, in media res, dans un univers nouveau, comme Alice qui passe la porte. Le son de ce quintet est déroutant. Sans doute parce que les instruments d’ordinaire acoustiques sont électrifiés. Le sax, le banjo et le violon ne sont pas seulement amplifiés, ils sont passés à la moulinette microphonique qui leur donne une proximité lointaine. Etrange sentiment d’un son à portée de main et pourtant gardé à la distance qui nous sépare du New Jersey… Le bluegrass des origines est métamorphosé, il a quitté son tout petit coin de campagne et son folklore, décapé, rapide, électrique et fondu dans le bop et le rock.

D’ailleurs, tout dans ce concert révolutionne la géographie. Le banjo ne peut s’empêcher de rappeler de temps à autres son appartenance à la country mais il se trouve nez à nez avec un violon tout juste débarqué d’un vieux pub irlandais. Le type costaud assis derrière la grosse batterie pourrait avoir boxé avec James Brown : il frappe ses caisses avec l’énergie de la funk ! Et Bill Evans, dans tout ça, passe du sax jazz indubitable à des chansons soul qu’il accompagne au synthé. La basse électrique, saturée aux bons moments, fait resurgir le rock des années 70, entraîné bien sûr par les solistes qui basculent eux-mêmes dans le blues destroy. Face à face d’époques distinctes pour un joli pari bien tenu !

On retiendra un concert énergique, pour ne pas dire énergétique tant la puissance circule d’un instrumentiste à l’autre à une vitesse ahurissante. On en arrive à se demander s’ils ne sont pas dans une salle de sport quand le violon reprend et allonge les étirements du soprano. Bandana pour le premier, banjo pour le second, longue queue de cheval pour le troisième ; la bande de cow boys fait le tour du ranch avec entrain, au galop ! Pas un western, non, plutôt un dessin animé de Tex Avery : la musique est amusante, festive, jouissive. En effet, il faut qualifier le spectacle dont on est témoin. Bill Evans n’est pas seulement un saxophoniste brillant au son séduisant, il est aussi un amuseur sympathique et ses airs de Richard Gere alimentent le show d’un chanteur de pop. Pourtant, il n’est pas là en star mais en bon vivant et sait toujours s’effacer humblement pour laisser ses musiciens dialoguer en toute liberté. C’était hier le premier concert de la tournée de leur nouvel album, ils ont bien mangé et bien rigolé et nous, on bien voyagé… That was good fun !

Juliette

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